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Contraception masculine : du « slip chauffant » à l’anneau, des méthodes thermiques prometteuses

« Slip chauffant », anneau contraceptif… Parallèlement à la recherche de molécules chimiques, hormonales ou non, la contraception masculine pourrait faire appel à une autre approche, thermique. Sur le principe, les effets bloquants sur la spermatogenèse d’une augmentation de quelques degrés des testicules sont connus depuis des décennies. Et, en pratique, de plus en plus d’hommes ont recours à des dispositifs – souvent dans un cadre artisanal – qui permettent de faire remonter les testicules au niveau du début du canal inguinal, pour se contracepter. Pour l’heure, il n’y a pas eu de validation par les autorités sanitaires, mais la donne pourrait bien changer dans les prochaines années.
Si l’histoire commence en Inde dans les années 1930, avec les expériences de la médecin suisse Martha Voegeli montrant une chute de la fertilité masculine grâce à des bains chauds quotidiens, c’est surtout en France qu’elle a continué de s’écrire. A Toulouse d’abord. Dans les années 1980, l’andrologue Roger Mieusset et le biologiste de la reproduction Louis Bujan font partie d’une association d’hommes qui réfléchissent aux questions de paternité, de contraception masculine… « Dans ce groupe, un agriculteur qui passait beaucoup de temps sur son tracteur nous avait raconté qu’il sentait ses testicules remonter, se souvient Louis Bujan. C’est ainsi que Roger Mieusset, qui travaillait déjà sur le sujet de l’hyperthermie et ses effets négatifs sur la spermatogenèse, a eu l’idée originale d’un sous-vêtement adapté. Dès 1987, il publie la méthode. » En 1994, les deux médecins toulousains rapportent dans l’International Journal of Andrology les résultats d’une étude préliminaire – portant sur neuf couples, et plus de 150 cycles – qui suggère que ce slip est une méthode de contraception efficace, bien tolérée et réversible. Pour entraîner une baisse drastique des spermatozoïdes (sous le seuil de 1 million/ml de sperme), il doit être porté au moins quinze heures par jour. De son côté, le chercheur égyptien Ahmed Shafik publie en 1991 des résultats comparables chez une trentaine d’hommes avec une chirurgie (réversible) de suspension des testicules.
Dans les années qui suivent, ces recherches n’iront guère plus loin, faute d’intérêt porté par d’autres équipes et de partenaires industriels, pour répliquer les études cliniques et en mener sur de plus grands effectifs. Le concept n’est pas pris très au sérieux. « Je trouve dommage qu’un industriel n’ait pas pris le sujet à bras-le-corps après que le docteur Mieusset eut breveté le dispositif. On aurait eu quelque chose de standardisé, qui répond à une demande croissante », regrette le professeur Bujan. Un mouvement que souligne aussi le généraliste et andrologue François Isus, qui a succédé à Roger Mieusset au sein du service de médecine et de biologie de la reproduction du CHU toulousain. En France, les stérilisations par vasectomie ont même été multipliées par dix en une dizaine d’années, plus de 21 000 ont été pratiquées en 2021. « J’ai beaucoup de demandes de contraception thermique, et me limite à 5-10 consultations par semaine, précise le docteur Isus. Je ne peux en prescrire, puisque ce n’est pas reconnu, mais je donne des informations, examine ces hommes pour vérifier l’absence de contre-indication, et réalise un spermogramme. » Ensuite ? Ceux qui le souhaitent peuvent, sous leur responsabilité, se fabriquer un sous-vêtement adapté ou se procurer un anneau contraceptif (actuellement en vente comme objet décoratif). « Un spermogramme de contrôle serait nécessaire tous les trois mois, mais la majorité n’ont pas de suivi », poursuit François Isus, qui dit réfléchir à un nouveau protocole d’étude clinique.
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